Vivre l'éphémère





La vie est une série d'événements éphémères dont nous oublions parfois l'existence vu la répétition de nos routines, et ce désir que nous avons très souvent que rien ne change. Un moment de bien-être et de confort nous donne l'envie irrésistible d'y rester. Du moins, c'est comme ça que je ressens et vis les choses. J'ai tendance à m'attacher au réconfort, aux choses et personnes sécurisantes. Je cherche à garder le contrôle sur la vie. Comme je l'ai déjà dis précédemment, j'ai souvent peur. Je suis assez facilement anxieuse, on dit de moi que je réfléchis trop, et que j'accorde de l'importance à certains détails plus ou moins importants qui finissent par me gâcher la vie. Par exemple, bien que j'essaie d'être le plus souvent positive et reconnaissante, je suis encore critique très souvent, je ne vous mentirai pas. La seule chose que je puisse faire à partir de maintenant est de simplement continuer à foncer et avancer en affrontant du mieux que je peux ces peurs et ces défauts.

La vie de nomade me soigne tranquillement je crois. Vivre au jour le jour, que ce soit en ville à Montréal ou ailleurs, me confronte régulièrement à la façon dont la vie fonctionne. Rien de permanent, tout tend à changer, se transformer, mourir, naître... Chaque jour, je dois penser à l'endroit où je poserai mon bus pour dormir, tout comme nous pensons tous quotidiennement aux aliments que nous mangeons. En choisissant cette vie, je me suis fait un cadeau, celui d'avoir du temps. Je vis plus simplement. Mon électricité est produite grâce au soleil, je ne réchauffe pas beaucoup d'eau, seulement pour me laver, je ne paie pas d'autre loyer que celui du prêt qui m'a permis de me procurer mon bus, et les paiements de son entretien. Depuis déjà quelques années, je ne dépense pratiquement plus pour du neuf. Si j'ai besoin de quelque chose de spécifique, premièrement je me pose la question à savoir si j'en ai réellement besoin, et si la réponse est oui, je me dirige vers les boutiques d'articles usagés, ou mieux encore, les événements de troc tels que ceux organisés par Troc-Tes-Trucs.

Grâce à ce tournant pris dans ma vie, j'ai une grande latitude d'action, vu la multiplicité de choix qui se présentent à moi jour après jour. Je ne fais pas trop de plans, car j'aime me laisser surprendre, et croire que les personnes et événements qui surviennent sur mon chemin sont là pour me faire grandir. J'ai choisi de prendre la vie telle qu'elle se présente. De toutes façons, les plans qu'on se fait se passent rarement selon nos attentes. Par exemple, en choisissant de vivre dans ce bus, je devais trouver une solution pour passer ce premier hiver. J'aurais pu me louer une chambre temporaire, ou retourner en appartement, comme j'aurais pu déconstruire l'intérieur de mon bus pour mieux le reconstruire avec des matériaux isolants, mais j'ai choisi de faire ce voyage au sud des États-Unis afin de bénéficier de températures plus clémentes. Cela m'aura donnée la chance inouïe de vivre des émotions fortes, et de voir des paysages grandioses. où écrire sur l'éphémère de la vie m'est venue puisque celle-ci est d'une évidence en voyage. Je sais que je ne reviendrai pas de sitôt à chaque endroit visité. J'aurais aimé que certains moments durent pour toujours. Pour n'en donner que quelques exemples, j'ai chanté aux sons d'instrumentistes jouant en direct, bière à la main, dans un parc de New Orleans, j'ai roulé dans de multiples déserts du Texas à la Californie, j'ai vu de ces levers et couchers de soleil, j'ai vu des animaux dans leur habitat naturel, et j'ai rencontré des gens formidables, qui comme moi, ont fait ce choix de vivre dans leur maison sur roues qu'ils peuvent déplacer au gré de leurs envies et des saisons. À chaque fois, j'ai vraiment tenté l'impossible pour vivre à fond dans le présent, et absorber le plus possible les détails de chacun de ces instants. Inexorablement, ces moments sont remplacés par d'autres et d'autres encore. C'est ce dont je parle lorsque j'utilise le mot éphémère. Vivre sur la route rend cela un peu plus visible. Disons qu'il devient plus ardu d'ignorer les changements de paysage parfois drastiques en regardant par la fenêtre. Aussi, les gens qu'on rencontre, et avec qui on crée de beaux liens reprennent la route dans des directions différentes.

Photo par Gerry Lauzon
Ceci étant dit, bien que je fasse le maximum d'efforts pour me rendre compte de tout ce que je vis et absorber chaque moment, chaque fabuleux coucher de soleil, chaque conversation, ces derniers deviennent souvenirs. Cela fait maintenant plus de 50 jours que j'ai quitté Montréal. Je n'ai pas publié ici depuis le 11 janvier, déjà presqu'un mois. Je n'ai pas accès comme je veux à l'internet avec mon ordinateur, et écrire avec mon téléphone ne m'inspire pas trop. Aussi, je prends le temps de ne pas faire grand chose, et ne pas écrire en fait partie. Je suis assez statique depuis ce dernier mois, je n'ai bougé réellement de campement que 3 ou 4 fois. Je suis dans ce qu'on appelle communément des BLM (Bureau of Land Management), qu'on peut comparer aux terres de la couronne chez nous. Sur ces BLM, on a le droit de se stationner gratuitement, sans être dérangé par quiconque pour une période de 14 jours à la fois, et plus parfois s'il n'y a pas de «rangers» qui viennent vous voir. La vie est paisible dans ces déserts. Ici, les heures semblent s'écouler aussi lentement qu'un sablier filmé au ralenti. J'aime cette sensation. Je suis très heureuse de mon choix de vivre plus simplement, ce qui me permet de travailler quelques mois, et respirer davantage sans travailler pour quelques mois. J'ai le temps de réfléchir, et de continuer de créer la vie qui me correspond. Ça fait 7 mois maintenant que j'ai ce mode de vie, et j'ai bien l'impression que ce n'est que le début. J'ai découvert quelque chose que j'aurais bien du mal à laisser de côté maintenant que j'y ai goûté.

Deux rassemblements qui m'ont confortée dans mon choix de mode de vie

J'ai participé, dans la région de Quartzsite en Arizona, à deux rassemblements de gens qui ont choisi sensiblement le même mode de vie que moi. Le premier, le WRTR, version pour femmes du RTR (Rubber Tramp Rendezvous) a été un moment extraordinaire pour moi. J'ai adoré voir toutes ces femmes vivant seules comme moi dans leur véhicule. Certaines vivent dans de toutes petites voitures, ou caravan du type Toyota Sienna, Dodge Grand Caravan ou Hyundai Entourage pour n'en nommer que quelques-unes. D'autres ont des vans converties telles que Sprinter, Ford Transit ou Promaster. D'autres encore vivent dans des roulottes ou campeurs plus conventionnels, et d'autres, comme moi, arrivent avec d'autres types de véhicules. J'étais la seule à ce rassemblement à vivre dans un Skoolie (c'est comme ça qu'on appelle les autobus scolaires convertis), mais lors du 2e rassemblement, le SkooliePalooza, j'ai rencontré d'autres femmes vivant seules dans leur bus, ainsi que des familles, des couples et des hommes seuls. La créativité de toutes ces personnes est ce qui m'a sauté aux yeux comme qualité commune. Créativité dans la création de leur petit cocon, mais aussi dans leur façon de subvenir à leurs besoins et de percevoir leur existence. Il n’y a certainement pas de norme ou de ligne directrice quand à la façon dont ces gens parviennent à faire l’argent nécessaire pour se nourrir et payer les frais inhérents à la vie. J’ai rencontré des travailleurs autonomes de toutes sortes qui vendent leurs services à distance ou non (traduction, enseignement en ligne, massothérapie, etc.), ou leurs produits (sandales faites à la main, crèmes, artisanat, etc.), des Youtubeurs, des gens qui s’y connaissent en criptomonnaie et en bourse, des retraités, des travailleurs d’emplois saisonniers ou qui se déplacent selon les jobs qui leur seront offertes, des gens qui possèdent de l’immobilier, etc. Je suis assez impressionnée par la débrouillardise et la résilience de plusieurs.

J'avais envie d'écrire sur ce sujet, car je sais que dans nos routines respectives, partagées entre le boulot, la famille et les amis, il reste souvent peu de temps pour réfléchir et réaliser que la vie est éphémère. Prenez le temps, vivez chaque moment, car la vie, c’est maintenant!

J’ai commencé à utiliser davantage Instagram pour partager des photos. Vous pouvez me trouver ici.

La fille qui va... lentement.




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